Diversifier les cultures : une clé pour une agriculture moins dépendante des pesticides
Une percée majeure a été dévoilée dans Nature communications, révélant les résultats d'une étude approfondie sur l'effet bénéfique de la diversification des cultures dans la réduction du recours aux pesticides en France. Ces résultats, basés sur l'analyse détaillée de plus de 14 000 observations, ouvrent la voie à une compréhension approfondie des liens entre diversité des cultures et dépendance aux pesticides, qu’ils soient fongicides, insecticides ou herbicides
La diversification des cultures émerge comme une pierre angulaire dans la transition vers une agriculture durable. Des chercheurs d’INRAE et de l’Institut Agro de Dijon ont examiné le lien entre la diversité des successions culturales en grandes cultures et l'usage de pesticides sur un très vaste ensemble de systèmes agricoles. Une relation encore peu explorée à cette échelle.
Leurs résultats, basés sur l'analyse de 14 556 observations dans 1 334 systèmes de grandes cultures en France, révèlent que la diversification permet de réduire significativement, d’environ 20%, l'usage de pesticides pour la plupart des cultures. Cette analyse est menée pour l’usage total de pesticides, mais aussi par type de pesticide (fongicide, insecticide, herbicide) et ce pour les 16 cultures les plus cultivées en France.
Par exemple, augmenter le nombre de familles botaniques (ex : Poacées telles que les céréales, Fabacées telles que les légumineuses, Brassicacées telles que les crucifères etc.) de 1 à 4 réduit de 19 à 23% l'utilisation de pesticides pour des cultures telles que le soja, la betterave, le tournesol et le maïs. En revanche, ces effets sont plus nuancés pour les céréales à paille, où aucun effet spécifique de la diversité n'a été observé. De façon intéressante, l'étude suggère également que les couverts végétaux d’interculture ne contribuent pas à la réduction des pesticides, mais plutôt à une augmentation de l'utilisation d'herbicides.
Les chercheurs soulignent l’importance d’adopter une quantification holistique de la diversité, prenant en compte la diversité des familles botaniques et la diversité intra-famille (ex. blé, orge, avoine, seigle pour les céréales ; pois, féverole, lupin, lentille pour les légumineuses, etc.), pour guider les pratiques agricoles vers une réduction significative de la dépendance aux pesticides.
Ces résultats marquent une étape cruciale dans la recherche de systèmes agricoles plus durables, soulignant le rôle essentiel de la diversité des cultures dans la réduction du recours aux pesticides.
Un réseau pour relever les défis
L’étude repose sur 14556 itinéraires techniques de conduite des cultures dans 1334 systèmes de grandes cultures du réseau de fermes DEPHY, répartis sur l’ensemble du territoire de France métropolitaine, et décrits sur les années 2010-2022. L’étude valorise donc la très grande diversité de pratiques agricoles observée dans le réseau, en fonction des régions, des années, mais aussi des stratégies individuelles de chaque agriculteur et agricultrice. L’indicateur d’usage de pesticide utilisé est l’Indice de Fréquence de Traitements (IFT) qui rend compte du nombre de traitements, des doses appliquées, et des proportions de surface traitées. La diversité des successions culturales de chaque système de culture est caractérisée par la diversité des familles botaniques et la diversité intra-famille.
Référence
Guinet, Adeux et al. (2023). Fostering temporal crop diversification to reduce pesticide use. Nature communications 14:7416 https://www.nature.com/articles/s41467-023-43234-x